Je n'étais pas allé depuis longtemps à la brocante des Marins, et j'ai bien failli une nouvelle fois renoncer. Vers huit heures, une grosse averse s'écrasant sur Châteauroux. Et puis le soleil est revenu assez vite, alors, chaussé de bons souliers, je me suis rendu sur place. Ma chasse au trésor commençait : objectif 14-18.
Il a suffi de deux stands, au début de mon parcours, pour remplir ma besace au-delà de mes espérances. Je trouvai sur l'un d'eux un exemplaire en solde mais en parfait état, du beau livre de Nicole Durand, De l'Horreur à l'Art, qui présente les productions artisanales que les poilus ont réalisées dans les tranchées, des objets taillés dans les balles et les obus, une véritable orfèvrerie dont on peut d'ailleurs voir quelques exemples à l'exposition d'Orsennes (visible encore jusqu'au 7 novembre).
Acquis également un supplément de huit pages au journal L'Illustration, consacré aux Croquis de Guerre 1914-1915 de François Flameng, Aquarelles et Sépias exécutées sur le Front.
Il a suffi de deux stands, au début de mon parcours, pour remplir ma besace au-delà de mes espérances. Je trouvai sur l'un d'eux un exemplaire en solde mais en parfait état, du beau livre de Nicole Durand, De l'Horreur à l'Art, qui présente les productions artisanales que les poilus ont réalisées dans les tranchées, des objets taillés dans les balles et les obus, une véritable orfèvrerie dont on peut d'ailleurs voir quelques exemples à l'exposition d'Orsennes (visible encore jusqu'au 7 novembre).
Acquis également un supplément de huit pages au journal L'Illustration, consacré aux Croquis de Guerre 1914-1915 de François Flameng, Aquarelles et Sépias exécutées sur le Front.
François Flameng n'était pas un poilu : il avait 58 ans lorsqu'il fut admis à suivre les armées dès 1914. Président d'honneur de la Société des Peintres militaires français, il n'a rien d'un Otto Dix qui veut mettre l'accent sur les horreurs et les souffrances de la Guerre. Sa volonté est de glorifier les troupes, de témoigner de la vaillance du soldat. Au départ, il n'est pas dans son intention de publier, mais on le presse d'accepter de le faire.
"En vain, écrit le rédacteur de L'Illustration, M. François Flameng objecta son appréhension de n'avoir peut-être pas rendu toute la grandiose beauté des scènes qu'il lui a été donné de contempler, le dramatique de ces champs labourés d'obus, de ces villages anéantis par le fer ou la flamme On insista ; il dut céder à ces amicales suggestions. Et voilà comment L'Illustration a la bonne fortune d'entreprendre la publication d'une série de documents d'un rare intérêt pour l'histoire de la plus gigantesque des guerres, série qui ne s'achèvera qu'avec la rentrée triomphale des troupes françaises."
Flameng livrera ainsi pendant toute la guerre des travaux pour le journal, sillonnant le front avec voiture et chauffeur. Son engagement officiel ne l'empêche pourtant pas de rendre avec réalisme des scènes de vie dans les tranchées. J'aime bien par exemple cette aquarelle, présente dans le supplément que j'ai acheté, décrivant le 28 juin 1915 la livraison de la soupe à Notre-Dame -de Lorette, un des lieux les plus meurtriers de ce début de guerre. Juste après un orage, la tranchée remplie d'eau.
"En vain, écrit le rédacteur de L'Illustration, M. François Flameng objecta son appréhension de n'avoir peut-être pas rendu toute la grandiose beauté des scènes qu'il lui a été donné de contempler, le dramatique de ces champs labourés d'obus, de ces villages anéantis par le fer ou la flamme On insista ; il dut céder à ces amicales suggestions. Et voilà comment L'Illustration a la bonne fortune d'entreprendre la publication d'une série de documents d'un rare intérêt pour l'histoire de la plus gigantesque des guerres, série qui ne s'achèvera qu'avec la rentrée triomphale des troupes françaises."
Flameng livrera ainsi pendant toute la guerre des travaux pour le journal, sillonnant le front avec voiture et chauffeur. Son engagement officiel ne l'empêche pourtant pas de rendre avec réalisme des scènes de vie dans les tranchées. J'aime bien par exemple cette aquarelle, présente dans le supplément que j'ai acheté, décrivant le 28 juin 1915 la livraison de la soupe à Notre-Dame -de Lorette, un des lieux les plus meurtriers de ce début de guerre. Juste après un orage, la tranchée remplie d'eau.
Mais la plus belle trouvaille fut sur le premier stand rencontré. Dans une valise pleine de feuilles volantes, couvertes de notes, de cartes postales, un vrai fouillis vendu cinq cents euros par l'exposant, je découvre une feuille isolée, que je déplie presque machinalement. Calligraphie soignée, daté du 15 juillet 1916, titré "Honneur aux Braves", ce feuillet s'avère une parodie satirique de message militaire. Jeux de mots sur les patronymes (Général Garré d'Eybal, secrétaire Latrouille, Commandant Louaindufeu), évocation burlesque de l'action héroïque d'un gros cultivateur embusqué. Je ne sais qui a rédigé ça (je me pose encore la question de son authenticité), mais ce document est bien représentatif du mépris que les poilus avaient pour ceux de l'arrière, les embusqués, qui échappaient de façon jugée frauduleuse à l'enfer du front. Un ton très Canard Enchaîné (faut-il rappeler que le Canard est créé par Maurice et Jeanne Maréchal en septembre 1915, justement pour lutter contre le bourrage de crâne).